Questions et réponses

Cette foire aux questions a été rédigée par Yann Rieder, auteur du manifeste — les propos tenus n’engagent que lui.

Le Manifeste Podcast Ouvert est un document rédigé le 7 juin 2019 par Yann Rieder — podcasteur francophone depuis 2007, co-fondateur de RadioKawa, et président de Blueprint.

Le manifeste vise à faire connaître au milieu du podcast, à la presse, et au public, des revendications que partagent les signataires quant à l’avenir du média podcast (économie générale, économie de sa distribution, etc.)

Pour deux raisons.

Premièrement, car ce manifeste n’a pas pour but de mettre en cause une personne / entreprise / entité, mais d’affirmer des principes qui seront tout aussi pertinents lorsque lesdites personnes / entreprises / entités auront cessé leurs activités au sein de l’écosystème podcast.

Deuxièmement, car il serait impossible de donner une liste exhaustive d’entreprises, d’entités adoptant un comportement que ce manifeste critique et conteste.

Certaines plateformes lancées ces derniers mois (voire années) exploitent la large masse de podcasts librement disponibles sur internet afin de :

  • les utiliser comme « appât », pour ensuite vendre aux utilisateurs de leur service... leurs propres productions inédites (qui, elles, ne peuvent être lues que depuis leur plateforme)
  • communiquer au sujet de cette large masse de podcasts comme étant des « contenus déjà disponibles » dans leur plateforme, alors que ces podcasts ne leur sont pas exclusifs et que, souvent, leur présence n’a jamais été autorisée par les podcasteurs concernés

Dans les deux cas, les signataires considèrent que l’usage qui est fait de leurs productions ne correspond pas à celui d’une application de podcast au fonctionnement standard.

Ces plateformes font dès lors preuve d’une suprême goujaterie en agissant de la sorte.

Certaines autres plateformes, plus anciennes dans certains cas, se permettent même de monétiser l’ensemble des podcasts qu’elles ont ajouté à leur catalogue (sans autorisation préalable des podcasteurs, faut-il le rappeler !) en interrompant ou intercalant la lecture de podcasts de publicités au seul profit de ladite plateforme.

D’autres plateformes encore ont décidé sans accord ou consultation préalable de copier les fichiers audio de podcasts sur leur serveur, de tronquer les descriptions d’épisodes, d’en retirer les liens (certains menant à des pages de crowdfunding lancées par des podcasteurs, pour se financer), etc.

L’ensemble de ces pratiques sont dénoncées par le présent manifeste.

Aussi, le manque de transparence dans la gestion de ces catalogues de plateformes (souvent basés sur une copie du catalogue Apple Podcasts / iTunes) peut soulever d’importants doutes sur les intentions desdites plateformes.

Oui. Et alors ?

Les podcasteurs n’ont pas donné leur assentiment — ni explicite, ni implicite — à ce type d’usage.

Qu’une plateforme décide d’utiliser le travail de dizaines de milliers de podcasteurs comme moyen de « lancer la machine » pour diriger les auditeurs vers LEUR offre payante, dont ils conservent 100% des bénéfices, et sans aucune forme de concertation concrète avec les podcasteurs concernés est un problème extrêmement concret.

Quand la visibilité se fait à la condition de l’exploitation imposée, dans son dos, du fruit de son travail, l’on peut dignement discuter du caractère net-positif de cette “visibilité” ; de ce supposé “boost d’audience”.

L’écosystème du podcast - en France comme en Amérique du Nord - est en essor depuis plus longtemps que ces plateformes n’existent.

La monétisation du podcast (à travers publicité, crowdfunding, etc.) est possible depuis bien avant le lancement de ces plateformes.

En vérité, le podcast, en tant que média, n’a absolument pas besoin des entreprises qui souhaitent aujourd’hui s’imposer en tant qu’intermédiaires entre les podcasteurs et leurs auditeurs.

Bonne question. Même si la majorité des podcasts sont accompagnés d’une mention “copyright (©)”, un nombre non-négligeable d’autres podcasts sont quant à eux publiés sous licence Creative Commons.

Selon les cas, ces licences exigent un usage non-commercial de l’œuvre créée (ça se repère au « NC » dans le nom de la licence utilisée).

Il s’agit d’un aspect légal que ces plateformes piétinent visiblement sans trop de regret — puisque le but est prioritairement de faire fonctionner leur business-model.

En vérité, le podcast, en tant que média, n’a absolument pas besoin des entreprises qui souhaitent s’imposer en tant qu’intermédiaires entre les podcasteurs et leurs auditeurs.

Le respect de la volonté des créateurs semble, une fois encore, optionnel et secondaire.

Le co-fondateur de Majelan étant un ancien président de Radio France, observons tout d’abord qu’il n’est pas surprenant que vous ayez beaucoup entendu parler de lui et de son entreprise, ces derniers temps.

Certaines des pratiques décriées par le manifeste ne concernent pas Majelan. Ce manifeste n’a donc pas été rédigé comme un « moyen déguisé de taper sur Majelan ».

Cependant, le timing est bien là : les pratiques atypiques de Majelan ont motivé l’auteur du manifeste à écrire un texte – mais celui-ci est « large », allant au delà du simple cas de cette entreprise et de ses pratiques.

Il y en a plusieurs :

  • Majelan a, par le passé, offert aux auditeurs la possibilité d’ajouter le podcast de leur choix à tout le catalogue (plutôt qu’aux seuls abonnements de l’auditeur) ; un danger pour les flux de contenus payants qui se retrouveraient rendus publics & un problème pour les podcasteurs souhaitant ne pas faire partie dudit catalogue. Cette fonctionnalité a été retirée le 19 juin 2019, Majelan prévoyant de la remplacer par un ajout “standard” (aux seuls abonnements de l’auditeur).
  • Majelan vend un abonnement de contenus exclusifs payants (le problème avec cette pratique est détaillé ci-dessus) ; pas ces autres applications

Les signataires du manifestes font une différence claire entre :

  • un ajout automatique au catalogue d’une plateforme qui le fait pour faciliter l’usage (recherche, abonnements) — c’est le cas, notamment, d’applications comme Overcast, Podcast Addict, Pocket Casts.
  • un ajout automatique au catalogue dans l’unique but de lui vendre un abonnement payant à des contenus exclusifs à la plateforme.

Oui. Cependant, ces formules payantes servent l’auditeur avec des fonctionnalités offrant un meilleure confort d’écoute et/ou d’usage.

Elles ne se servent pas de podcasts publiés sur internet comme appât pour un abonnement payant à une collection de contenus verrouillées dans la plateforme.

Non.

Certains acteurs — dont Radio France — souhaitent, selon des déclarations récentes de hauts responsables de l’entreprise, faire pression sur les grandes applications et plateformes de podcasts pour, entre autres, obtenir plus de données sur les auditeurs de podcasts et négocier certains privilèges de mise en avant.

De telles ambitions — également affichées par la BBC — vont à l’encontre du principe même d’ouverture, d’accès égal à tous et d’intéroperabilité propre à la philosophie profonde du média podcast.

De plus, la demande faite par ces acteurs pour plus de données récoltées sur le comportement des auditeurs nous paraît être une violation injustifiable de la vie privée des auditeurs : les données récoltées aujourd’hui (nombre de téléchargements uniques, d’abonnés, etc.) sont amplement suffisantes pour monétiser tout podcast.

Ces acteurs de premier plan envisagent également de bloquer les plateformes de podcasts qui ne les avantageraient pas de la sorte. Ces intentions sont perçues, dans le présent manifeste, comme négatives pour l’écosystème du podcast ouvert.

Pire, ces acteurs esquissent également la possibilité de rendre leur replay radio exclusif à leurs applications. Il ne s’agirait alors plus d’une diffusion « en podcast » mais bien d’une app de replay radio — comme existent des applications de replay TV (à la France.tv, M6 Replay, MYTF1, etc.)

Si vous êtes podcasteurs (petit ou grand, hobbyiste ou professionnel), si vous travaillez pour une structure (association, entreprise) qui produit du podcast, ou même si vous travaillez dans le milieu des médias : signez-le !

Si vous êtes simple auditeur, partagez-le, parlez-en !

Rien n’est prévu, et franchement, gérer les signatures d’un simple manifeste... c’est déjà beaucoup de travail !

Dès la première signature, le manifeste n’a pas été modifié — et ne le sera pas. Même pour corriger une faute de frappe.

L’explication : ce serait trahir les signataires que de toucher au texte du manifeste en cours de route. Il ne changera donc pas !

De l’avis de l’auteur du manifeste, il s’agit de la constitution d’un monopole autour d’un seul acteur (ou de deux ou trois géants).

Aujourd’hui, et en l’état, deux entreprises sont en mesure de prétendre à établir un monopole dans le domaine de la distribution (et même de la production / monétisation) du podcast : Spotify et Apple.

Pour l’instant, elles n’ont pas encore agi d’une manière trop inquiétante — si ce n’est le nombre grandissant de rachats, en 2019, par Spotify, d’entreprises actives dans le média podcast.

Affaire(s) à suivre...

Un contenu audio au format MP3, diffusé dans un flux RSS au format XML.

Les deux sont interopérables (peuvent être lu dans toutes les applications de podcasts, sans discrimination).

Le terme « podcast natif » est apparu dans la presse aux environs de 2015, au lancement de sociétés telles que Binge Audio, Nouvelles Écoutes, etc.

Ce terme est censé faire la différence entre les flux podcasts de replay radio d’un côté, et les productions inédites distribuées en podcast (les fameux « podcast-natif »).

Certains — dont l’auteur du manifeste — estiment que ce terme est artificiel, et ne décrit rien de particulier. Il privilégie de tout appeler « podcast », à l’exception :

  • du replay radio (c’est de la radio EN podcast, mais c’est toujours une émission radio et pas UN podcast)
  • des contenus disponibles uniquement dans certaines (voir une seule) application. Vu que ces contenus ne sont pas disponibles EN podcast, il est inexact de les décrire comme DES podcasts.

En somme, il propose de faire la différence entre le moyen de diffusion (publier EN podcast) et le type de contenu inédit à ce mode de diffusion (UN podcast).

Oui. C’est votre droit le plus entier — signer ce manifeste signale votre soutien à un certain nombre d’idées, mais ne vous engage à rien d’autre.